La plupart des analystes du secteur, du Construction Intelligence Center à PricewaterhouseCoopers (PwC), sont d’accord pour dire que la construction va faire face à un boom économique. Un rapport intitulé « Global Construction 2030 », sponsorisé par PwC et publié par Global Construction Perspectives, en collaboration avec Oxford Economics, prévoit un taux de croissance cumulée de 85 %, pour atteindre 15,5 mille milliards de dollars en 2030. Ce taux est supérieur de plus d’un point au taux de croissance annuelle de 3,9 % prévu pour l’ensemble de l’économie mondiale, en grande partie grâce à l’augmentation rapide de la population urbaine.
Un nuage menaçant se dissimule toutefois derrière ces prévisions de croissance ambitieuses. Les experts affirment que le secteur est tellement fragmenté, avec un grand nombre de segments (architectes, ingénieurs, entreprises de construction et plusieurs dizaines de corps de métiers différents, petits et grands), qu’il n’est pas prêt à soutenir un tel niveau de croissance.
UN IMBROGLIO JURIDIQUE
Javier Glatt, cofondateur et PDG de CadMakers Virtual Construction, une entreprise de technologie de construction unifiée basée à Vancouver, affirme que la gestion de la responsabilité légale est à l’origine de cette fragmentation du secteur. « La fragmentation est due à des problèmes de risques et de responsabilités, ainsi qu’à leur répartition au sein du secteur », déclare-t-il.
Au fur et à mesure que les bâtiments deviennent plus grands et plus complexes, ils requièrent plus de compétences spécialisées à toutes les étapes de leur construction. On fait appel à différents niveaux de sous-traitants, non seulement pour réaliser le travail, mais également pour assumer une partie des risques. Javier Glatt évoque un déséquilibre des motivations entre les donneurs d’ordre et les intervenants, les uns s’efforçant de réduire les coûts et les autres de tirer profit des hausses de budget.
« Les résultats indiquent que la réalisation de projets unifiés entraîne des améliorations significatives de performance et une réduction des pertes. »
DONNA LAQUIDARA-CARR
DIRECTRICE DE INSIGHTS RESEARCH, DODGE DATA & ANALYTICS
Même la phase de conception se fragmente, avec différents acteurs responsables de la structure, de la façade, de la visualisation, de l’analyse et de divers systèmes de la construction. La bonne nouvelle, malgré tout, c’est qu’il existe une marge de progression importante.
« Automatiser les processus et réaliser des composants préfabriqués hors site permet de réduire les risques, les coûts, les pertes et les erreurs, indique-t-il. L’utilisation d’un modèle 3D unique, accessible à tous, contribue à résoudre de nombreux problèmes qui surviennent lorsque les intervenants ne communiquent pas ou ne peuvent pas communiquer entre eux. »
Lorsque chaque intervenant développe son propre modèle et ses propres données, les risques d’erreurs et de malentendus augmentent. Selon Javier Glatt, en utilisant un modèle unifié, « les constructeurs comprennent mieux leur rôle au sein du projet et leurs interactions avec les autres intervenants. Ils peuvent donc se concentrer sur leurs compétences propres, résoudre des problèmes et mener à bien le projet de manière plus efficace. »
UNITÉ ET QUALITÉ
Les recherches menées par Dodge Data & Analytics, le premier fournisseur de données, d’analyses, d’informations et de solutions intelligentes pour le secteur de la construction en Amérique du Nord, confirment ces observations. Selon Donna Laquidara-Carr, directrice Insights Research de Dodge Data & Analytics, l’analyse des données sur les secteurs de l’architecture, de l’ingénierie et de la construction (AEC), établie à partir d’une étude menée en partenariat avec le Lean Construction Institute, montre que 92 % des « projets types » (ceux qui souffrent de la fragmentation) font l’objet de retards, 85 % dépassant le budget et 63 % présentant des défauts de qualité.
« Les résultats indiquent que la réalisation de projets unifiés entraîne des améliorations significatives de performance et une réduction des pertes, affirme-t-elle. Par ailleurs, nous entendons très souvent que la clé, pour bénéficier de ces avantages, est la mise en place d’une collaboration dès le début du projet. »
Selon Donna Laquidara-Carr, les données montrent que seuls 1 % des maîtres d’ouvrage ont fait appel à des outils de gestion de projet unifiés, lors de « projets type », tandis que ces outils ont été utilisés dans 22 % des « projets les plus performants » du secteur. En conséquence, 68 % des « meilleurs projets » ont fait preuve d’une bonne cohésion d’équipe, contre 10 % pour les « projets types ». Les équipes étaient bien intégrées dans 61 % des « meilleurs projets », et seulement dans 9 % des « projets types ».
Les données indiquent que lorsque toutes les parties prenantes, y compris les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre et les corps de métier, sont réunis dans une « big room » (« grande salle ») virtuelle qui optimise le travail en équipe, le secteur de l’AEC devient bien plus efficace, selon Donna Laquidara- Carr. Une « big room » virtuelle, c’est une plate-forme unifiée de collaboration et de communication en ligne.
Le Building Information Modeling (BIM) a longtemps été perçu comme une solution à la fragmentation, mais l’expérience montre qu’il a aussi ses limites.
LES LIMITES DU BIM
Tim Beckett, directeur de Beckett Rankine, une société de conseil basée au Royaume-Uni et spécialisée dans le génie maritime, est responsable de la conception du Thames Tideway Tunnel, d’une longueur de 25 km et d’un diamètre de 7,4 m. Un budget de 4,2 milliards de livres sterling (environ 4,9 milliards d’euros) est prévu pour ce tunnel d’évacuation, surnommé le « super sewer », qui atteindra une profondeur de 65 mètres.
Les systèmes classiques de Building Information Modeling (BIM) sont parfois « difficiles à utiliser, coûteux, et ils nécessitent des compétences très spécialisées », affirme Tim Beckett. Le cloud permet, selon lui, de bénéficier des avantages et des possibilités qu’offrent les systèmes de BIM, tout en rendant les informations largement accessibles aux participants, quel que soit leur niveau de compétences.
« Le Thames Tideway Tunnel devrait être opérationnel pendant plus d’un siècle. Toutes les données doivent donc être pérennes, indique-t-il. Une solution de gestion de projet dans le cloud, à cette échelle, offrirait aux intervenants, aujourd’hui comme à l’avenir, un accès simple, peu coûteux, permanent et facilement identifiable, aux données dont ils ont besoin. »
RAPPROCHER LES CONTINENTS
« Des simulations visuelles et des données de haute résolution sont nécessaires pour bien préparer et détailler des projets très complexes », affirme John Cerone, directeur de la construction et de la conception virtuelle du cabinet d’architecture SHoP Architects, basé à New York. « Les systèmes de BIM classiques sont adaptés aux constructions traditionnelles, mais les constructeurs ont constaté qu’une approche 3D, unifiée et de haute qualité, dans le cloud, leur permet d’être plus efficaces et plus profitables. »
Selon John Cerone, ce n'est qu'une question de temps avant que ce secteur n'adopte une approche unifiée pour gérer les données des projets de construction.
« La construction représente une partie tellement importante de l'économie mondiale, qu’elle peut permettre d’économiser des milliards de dollars en améliorant l’efficacité », indique-t-il. Fait encourageant, ShoP reçoit de nombreux signaux de constructeurs souhaitant échanger sur les bénéfices de la mise en place d’une approche unifiée.
Remplacer les processus linéaires par des méthodes de travail en simultané permet d’accélérer les étapes de la conception à la fabrication, d’améliorer la précision tout en conservant, automatiquement, une rigueur financière. « Si les constructeurs automobiles peuvent déterminer, au micron près, la quantité d’acier nécessaire à la réalisation d’une voiture, pourquoi ne serait-ce pas possible dans le cas d’un bâtiment ? », explique John Cerone.
Dans un projet en cours, le « Botswana Innovation Hub », un symbole de la politique du Botswana en faveur de la recherche et développement, ShoP est parvenu à ce niveau « d’expertise numérique » pour un projet pourtant géré entre l’Amérique et l’Afrique. Selon John Cerone, il en résulte « une rapidité sans aucune perte, une précision parfaite lors de la fabrication et un contrôle budgétaire absolu. »
« Un nouveau paradigme, basé sur des modèles 3D, qui motive l’innovation, génère plus de profits et contribue à construire des bâtiments de meilleure qualité, commence à apparaître dans le secteur de l’AEC, déclare-t-il. Le secteur est en pleine transformation, et c’est passionnant de participer à cette évolution. »
Le BLM (Building Lifecycle Management) c’est la modélisation des données de construction du BIM (Building Information Modeling) associé aux fonctionnalités et aux processus du PLM (gestion du cycle de vie des produits). Cette approche permet de mieux prévoir la construction et d'améliorer la valeur et la rentabilité à long terme. Les principaux avantages du BLM sont : Une meilleure productivité : il permet d'éliminer les problèmes de versions puisque tous les utilisateurs accèdent à une base de données unifiée. Les erreurs humaines, les corrections et les itérations sont donc considérablement réduites. Augmentation de la qualité et de la valeur : grâce à des données contextuelles plus riches, les concepteurs prennent de meilleures décisions. L'accès aux données en temps réel permet également d’améliorer la gestion, la traçabilité et la coordination entre les acteurs, ce qui favorise une réalisation plus rapide et plus précise. Réduction du gaspillage, des risques et des coûts : le BLM permet de réduire les pertes en anticipant de manière précise le résultat final. Il permet d’identifier les conflits potentiels et optimise les processus de construction. Le BLM minimise les risques de retard et de dépassement des budgets. Un gain de compétitivité : Avec un système de BLM, votre équipe devient plus efficace, elle fournit une qualité supérieure, s’assure de la fidélité des maîtres d'ouvrage et des partenaires de conception. Au final, vous dégagez une marge financière plus importante. Pour plus d'informations, rendez-vous sur la page : 3ds.one/end-to-end-bimQuatre avantages du Building Lifecycle Management :