Biens de consommation et distribution

SHOWROOMING : Créer des magasins qui répondent aux besoins des consommateurs

Jacqui Griffiths
26 October 2013

5 minutes

Alors que le commerce électronique ne cesse de progresser, attirer les clients dans les magasins traditionnels relève de plus en plus de la gageure. Et ceux qui s’y rendent finissent souvent par acheter en ligne. Pour que leurs boutiques soient rentables, les distributeurs s’efforcent d’en faire des lieux attrayants, non seulement pour essayer un produit mais également pour l’acheter.

La téléphonie mobile représente de multiples défis pour les distributeurs, mais elle leur offre également de nombreuses opportunités. Le cabinet d’audit et de conseil Deloitte estime que 75% des consommateurs recherchent des produits aussi bien en ligne qu’en magasin avant de faire un achat. Par ailleurs, l’enquête annuelle « Mobile Life » réalisée par l’institut de sondages TNS, basé à Londres, indique qu’un tiers des consommateurs sont des adeptes du « showrooming », qui consiste à faire du repérage en magasin avant d’acheter chez un concurrent en ligne.

Le showrooming peut être un véritable fléau pour les boutiques qui ont pignon sur rue. Pour lutter contre cette tendance, les magasins physiques doivent considérablement améliorer l’expérience des consommateurs pour les inciter à acheter leurs produits directement sur place.

« Améliorer l’expérience en magasin est essentiel pour que les boutiques physiques puissent conquérir les clients et les fidéliser », explique Shelley E. Kohan, vice-présidente du service de conseil aux distributeurs du cabinet d’analyse In-Store RetailNext (États-Unis), dans un article récent de la revue Chain Store Age. « Les clients souhaitent explorer, apprendre et s’amuser. Et surtout, ils veulent cette satisfaction instantanée que procure un produit en stock et facile à trouver. »

Les distributeurs prennent les propos de S. Kohan à cœur. Ainsi, la marque anglaise Burberry propose une expérience captivante dans son magasin phare à Londres, où une galerie retraçant l’histoire de la marque est aménagée à côté d’écrans numériques, de haut-parleurs, d’une scène hydraulique et d’iPads.« Ce n’est pas qu’une question de shopping », déclare Christopher Bailey, directeur de la création chez Burberry au site de mode The Business of Fashion. « Ce qui compte, c’est que lorsque vous entrez, vous vous amusiez. »

UN ESPACE INTELLIGENT

Les capacités analytiques propres à la vente en ligne sont désormais une réalité pour les magasins physiques. Les codes QR, les étiquettes RFID, les applications shopping et les clips vidéo en magasin apportent des informations essentielles sur la manière dont les clients interagissent dans la boutique, pour que les vendeurs puissent exploiter judicieusement leur espace.

L’essor de telles technologies dans les magasins traditionnels s’inscrit dans le droit fil des dix prévisions 2013 formulées par le cabinet d’analyse IDC Retail Insights, qui a annoncé que les distributeurs « axeraient leur merchandising et leur marketing sur l’analytique client » en investissant « dans les technologies d’analytique client, de merchandising et de marketing » ainsi que dans les « technologies qui permettent visibilité, visualisation et virtualisation ». Grâce à ces plateformes perfectionnées, les distributeurs peuvent réunir des informations telles que des analyses de données en magasin, des retours d’expérience de consommateurs et des stratégies de marque, et les transmettre directement aux équipes de planification pour permettre des décisions réfléchies sur l’agencement des magasins et l’assortiment des produits.

« L’objectif est d’avoir un système de mesure en magasin qui reproduit les fonctionnalités en ligne : le qui, où, quoi, quand et comment des clients », affirme S. Kohan. « Les données ne sont pas suffisantes ; les distributeurs doivent les exploiter de manière à accroître la valeur actionnariale. La mesure des Big Data dans les magasins physiques permet de personnaliser et de cibler le marketing, mais également de prévoir les comportements des clients dans les boutiques. »

DÉLIVRER UNE EXPÉRIENCE

Le magasin n’est pas tout ; le service à la clientèle est un aspect essentiel de l’expérience en boutique, avec laquelle la vente en ligne ne peut pas rivaliser. IDC Retail Insights indique que près de 60% des consommateurs ont plus tendance à acheter en magasin lorsqu’ils sont assistés par un employé digne de confiance et informé, mais qu’ils souhaitent également avoir accès à un contenu mobile. Environ 64% affirment que les informations obtenues par leur smartphone en magasin influencent autant leurs décisions que ce que leur apprend une recherche approfondie en ligne à domicile.

« Plutôt que de considérer le portable comme une menace, les distributeurs doivent l‘envisager comme le moyen le plus immédiat et personnalisé de susciter l’intérêt des acheteurs pour s’assurer qu’ils ne quittent pas le magasin les mains vides », déclare Matthew Froggatt, directeur du développement chez TNS.

En avril 2013, Marks & Spencer a ouvert son nouveau concept-store aux Pays-Bas, équipé de technologies innovantes. Dans la boutique, les clients peuvent acheter de la nourriture, mais aussi parcourir toute la gamme de vêtements sur des tables et des écrans numériques dans le magasin. (Photo © Marks & Spencer)

Ce service personnalisé peut même commencer avant que les clients n’entrent dans le magasin, sous réserve de leurs préférences en matière de confidentialité. « Certains magasins complètent la technologie de géolocalisation avec l’analytique et des applications, de sorte que lorsqu’un client se trouve à proximité, il reçoit un message qui l’intéresse », explique Greg Girard, directeur de programme du département stratégies de merchandising chez IDC Retail Insights. « Si une cliente abandonne une robe dans son panier en ligne et se retrouve devant le magasin, elle aura certainement plus de questions sur la robe que sur le prix. Vous pouvez donc faire apparaître un message pour lui dire qu’un employé va l’accueillir et répondre à ses questions. Vous laissez donc tomber la possibilité d’une remise et lui offrez le service qu’elle attend réellement. »

Dans le magasin, les codes QR et les étiquettes RFID peuvent apporter des informations pertinentes et interactives sur les produits grâce au smartphone des clients ou sur les miroirs et écrans numériques. Les marques Burberry, Guess et Benetton vont encore plus loin et fournissent des tablettes au personnel pour leur donner un aperçu des stocks et des préférences des clients, de sorte à offrir un service plus intuitif et personnalisé.

Les applications shopping sont également très appréciées. Ainsi, l’enseigne américaine Walmart a conçu une application qui aide les clients à organiser leur visite et enrichir leur expérience en ligne et en magasin. « Nous pouvons saluer les clients par leur prénom, les guider dans nos magasins, leur recommander des produits et leur offrir un réel gain de temps – le tout depuis leur téléphone portable », commente Gibu Thomas, vice-président adjoint du département mobile et numérique de Walmart.

LE CONFORT DU CLIENT

Ce type de connectivité, soutenue par une visibilité de l’inventaire sur l’ensemble du réseau et une livraison rapide des articles en rupture de stock, aide certains distributeurs à exploiter le showrooming à leur avantage.

« Ce n’est pas qu’une question de shopping. Ce qui compte, c’est que lorsque vous entrez, vous vous amusiez. »

Christopher Bailey
Directeur de la CRÉATION, BURBERRY

Par exemple, le britannique Dixons Retail, spécialisé dans la revente de matériel électronique au grand public, a formé son personnel et supprimé les objectifs de vente qui plaçaient ses propres magasins en concurrence avec l’offre en ligne de l’entreprise. Il propose désormais des programmes d’incitation à l’échelle du magasin, liés à la satisfaction du client, que la vente soit réalisée en ligne ou en magasin. « Nous avons considérablement amélioré notre recherche en ligne et nous permettrons aux magasins de créditer les ventes en ligne dans leur zone de chalandise », explique le PDG de Dixons, Sebastian James, à Retail Week. « C’est une bonne pratique, mais étonnamment peu de distributeurs l’utilisent. »

« La clé est de trouver un moyen de faire de l’achat en magasin l’option la plus pratique », résume M. Froggatt. « Tout ce qui fait économiser du temps et de l’argent au consommateur, et lui évite du stress permettra de réduire le nombre de clients qui achètent ailleurs. »

Si le commerce électronique donne du fil à retordre aux distributeurs traditionnels, il offre également la possibilité d’exploiter les informations et d’intégrer les préférences technologiques des clients à l’espace physique du magasin. Les distributeurs qui saisissent cette chance créent des magasins qui répondent à la demande des clients d’aujourd’hui, accessibles à tout moment et partout.

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