COMPASS: De nombreux produits extraits par Anglo American se révèlent essentiels dans la vie actuelle. D’après vous, quel est le poids de l’industrie minière dans la prospérité mondiale ?
Mark Cutifani : Sans l’industrie minière, la vie telle que nous la connaissons n’aurait pas lieu. Votre smartphone est composé de 76 minéraux différents. En termes économiques, nous représentons 8% à 10% du produit national brut (PNB) mondial. Le secteur des services qui supporte l’industrie minière génère 18% de ce PNB. Si nous prenons en compte les produits que nous extrayons et leur importance pour les autres industries, les mines servent de moteur à 45% de l’économie mondiale.
En outre, l’extraction minière est l’une des industries les moins invasives pour l’environnement. Nous sommes à l’origine des produits qui rendent potable l’eau et qui purifient l’air. Nous générons moins de 2,5% des gaz à effet de serre mondiaux. Les engrais que nous produisons ont permis de nourrir la population en utilisant moitié moins de masse qu’il n’aurait fallu.
On peut nettoyer l’eau et replanter des arbres, mais on ne peut pas remettre les minerais en place lorsqu’on les a extraits. Ne craignez-vous pas d’épuiser les ressources terrestres ?
M.C. : Les évolutions technologiques des 5 000 dernières années nous ont aidés de trois manières. D’abord, l’extraction des ressources est plus efficace et limitée à ce qui est nécessaire pour subvenir à nos besoins. Nous sommes bien loin d’avoir épuisé les richesses de la planète. Ensuite, le développement de la science des matériaux nous permet d’utiliser bien moins de métaux qu’il y a 100 ans, à résultat égal. Ce qui signifie que notre consommation (de ressources minérales) par personne a décliné. Bientôt, nous n’aurons plus besoin de minerais de fer car nous aurons découvert d’autres matériaux qui satisferont ces besoins de manière plus efficace.
« NOUS AVONS ÉNORMÉMENT À APPRENDRE DE NOS COLLÈGUES D’AUTRES INDUSTRIES. »
MARK CUTIFANI
PDG, ANGLO AMERICAN PLC
Enfin, il existe une grande variété de minerais et les technologies évoluent tellement vite. Dans un siècle, nous pourrons nous approvisionner grâce à des technologies inimaginables aujourd’hui. Qui sait, peut-être même exploiterons-nous des mines sur la Lune ? La puissance intellectuelle que nous emploierons pour résoudre ces problèmes trouvera forcément des solutions.
Vous vous êtes montré très clair sur le besoin de l’industrie minière d’apprendre de ce que vous appelez « les infatigables innovateurs » des autres secteurs. Que peut donc apprendre l’extraction minière de la production sur mesure, par exemple ?
M.C. : Plus le temps passe, moins il reste de gisements riches à découvrir. Être le premier à découvrir le potentiel d’une ressource et comment l’extraire efficacement pourrait nous donner un avantage pendant cinq ans. Depuis 70 ou 100 ans, le secteur de la production se trouve dans une situation où l’avantage concurrentiel repose sur la capacité à innover, le pilotage des processus sous-jacents et la réactivité sur le marché. Nous avons énormément à apprendre de nos collègues d’autres industries sur ces trois fronts.
Pensez-vous à des compétences particulières que l’industrie minière devrait acquérir pour se montrer plus innovante ?
M.C. : Nous avons à apprendre dans trois domaines. Le premier est de conceptualiser et modéliser comment nous pouvons être plus novateurs. Modéliser des scénarios qui nous permettraient d’être plus efficaces dans un environnement dynamique nous aiderait à comprendre comment innover. Le second, c’est d’intégrer les idées des collaborateurs à nos processus. Enfin, nous devons améliorer nos technologies de transformation afin de générer davantage de valeur pour nos clients et actionnaires à partir de nos produits. Dans ces trois domaines, l’industrie minière a énormément à apprendre des autres secteurs. ◆