À mesure que les pressions augmentent, les entreprises de nombreux secteurs industriels exploitent de nouvelles technologies puissantes afin d’associer leurs collaborateurs, leurs partenaires et leurs clients au concept, et créer des expériences clients mémorables. Des industries de process à l’exploitation minière, ces outils numériques novateurs tels que la collaboration en ligne ou les tableaux de bord transforment progressivement les informations brutes en renseignements exploitables et en avantages concurrentiels.
LES INFORMATIONS PASSÉES AU CRIBLE
Pour réussir, une entreprise doit comprendre la problématique de ses clients. Elle doit donc poser les bonnes questions et analyser d’importantes quantités d’informations. Cependant, avec d’innombrables sources de données, les entreprises risquent d’être débordées. Les tableaux de bord, qui permettent d’organiser et d’analyser les données de manière personnalisée pour chaque utilisateur, s’avèrent des « postes d’écoute » efficaces pour les entreprises qui peuvent ainsi repérer les nouveaux besoins de leurs clients et les tendances du marché.
Véolia Water, leader mondial du traitement de l’eau, des déchets et de l’énergie, utilise des tableaux de bord pour ordonner et filtrer la masse d’informations dont il dispose pour les besoins de sa veille économique. « Ce n’est pas parce que nous disposons d’une abondance de données que nous prendrons forcément de meilleures décisions ou des décisions plus précises, car ces informations ne sont pas toutes importantes ou pertinentes », explique Michèle Champagne, qui dirige le département contrôle et gestion de l’expertise de la société. « C’est pourquoi nous avons décidé de concevoir et de mettre en place une approche de contrôle et de gestion de l’expertise, afin d’identifier de manière exclusive les connaissances et le savoir-faire essentiels à nos activités. Nous utilisons ensuite ces informations pour évaluer notre capacité à répondre aux tendances du marché et mesurer notre positionnement par rapport à nos concurrents. »
En 2007, Véolia Water a mis en place un programme visant à identifier et gérer des connaissances stratégiques pour se différencier de la concurrence, avec notamment des veilles technologiques et des services en matière de brevets, qui aident l’entreprise à anticiper les développements technologiques et les tendances environnementales. Grâce à ses tableaux de bord, Véolia Water collecte et trie les informations provenant de sources spécialisées, incluant des bases de données, des sites Internet, des sources institutionnelles et concurrentielles afin d’identifier les informations ciblées qui seront ensuite analysées.
« Un tableau de bord nous fournit une réserve de données fiables, ce qui nous permet de gagner du temps et résoudre des questions importantes. »
Michèle Champagne
Département contrôle et gestion de l’expertise, Véolia Water
Des réseaux de contrôle sont mis en place pour différents sujets techniques. Des tableaux de bord filtrent et présentent les informations les plus prometteuses, qui sont ensuite analysées par des experts de la question, en collaboration avec les ingénieurs. Lorsqu’un élément d’action est identifié, il est ajouté au programme de travail des ingénieurs.
« Un tableau de bord pouvant contenir jusqu’à 250 sources d’information, il constitue un atout important pour l’entreprise », souligne M. Champagne. « Il nous fournit une réserve de données fiables, ce qui nous permet de gagner du temps et résoudre des questions importantes. »
LA RECHERCHE DYNAMIQUE DE DONNÉES
Trouver les informations nécessaires pour accomplir une tâche spécifique devient de plus en plus ardu tant les données abondent. La Banque mondiale relève ce défi en s’aidant d’un moteur de recherche puissant pour trier et classer par ordre de priorité les informations internes à la manière de Google, Yahoo! ou Bing.
« La Banque remplit tant de rôles différents que la recherche de données a toujours été pour nous une véritable gageure », explique Raman Pugalumperumal, responsable des solutions d’entreprise à la Banque mondiale et l’un des principaux architectes du projet de recherche. La banque dispose de données relatives au suivi de la gestion de projets et de la gestion fiduciaire, de différents ensembles de données économiques, de rapports d’application des réglementations, de comptes rendus de recherche, de publications et de rapports sur les enseignements tirés des projets de développement figurant dans ses archives. Sa base de données comprend également des comptes rendus des colloques organisés par la Banque et des rapports sur les nombreuses activités de recherche menées par celle-ci, ainsi que les compilations annuelles des Indicateurs du développement dans le monde. « La recherche permet l’agrégation de ces données », ajoute R. Pugalumperumal.
« Les données financières et techniques, les données des projets, les bonnes idées ainsi que les enseignements tirés de projets similaires, afin d’éviter de reproduire les mêmes erreurs, sont répliquées. Agissant comme un agrégateur, notre système de recherche de données est devenu un fournisseur de services de données impressionnant. Nous enregistrons 7 millions de visites par semaine sur nos interfaces de programmation. »
Fournir du contexte qui ajoute du sens est un objectif prioritaire du projet. « On ne peut pas se contenter de fournir une liste de résultats. Le contexte a beaucoup d’importance. C’est pourquoi, quand vous effectuez une recherche, vous pouvez également voir s’afficher le nom de l’expert de la banque qui connaît le mieux le sujet qui vous intéresse, ou tout autre renseignement qui vous dirigera vers les ressources susceptibles de vous aider à atteindre votre objectif », souligne R. Pugalumperumal.
La recherche de données est un travail au long cours à la Banque mondiale, et le sera probablement toujours, constate-t-il. « Nous gérons un volume de données phénoménal, 11 millions d’articles, 100 millions de fichiers partagés sur le réseau. Plus nous en offrons, plus on nous en demande. Notre organisation est si diversifiée que l’outil doit connaître la place de la personne dans l’organisation pour adapter la recherche à ses besoins. Les faits montrent que nous progressons de manière significative dans ce processus qui, loin d’être fluide, se déroule étape par étape. »
INNOVATION SOCIALE ET SAVOIR
Toutes les connaissances d’une entreprise ne sont pas contenues dans ses bases de données. Les connaissances de chaque collaborateur sont encore plus riches. Elles sont cependant plus difficiles à exploiter car les équipes sont de plus en plus réparties à travers le monde ou isolées par fonctions. La technologie d’innovation sociale inspirée par Facebook, adaptée au monde de l’entreprise, contribue à tirer parti des connaissances uniques de chaque personne, indépendamment de son rôle et de son lieu de travail.
Lorsque, par exemple, l’équipementier automobile Visteon a formé une équipe internationale pluridisciplinaire afin de mettre au point un nouveau concept automobile, il a utilisé une application d’innovation sociale basée sur le cloud pour faciliter la collaboration, le partage d’idées et le suivi du développement. Cette application fournit par ailleurs de nombreuses sous-communautés prenant en charge des projets annexes, ce qui permet à chaque zone géographique d’adapter Le concept à son marché spécifique.
« Ce projet est centré sur une certaine vision de la mobilité en 2020, une vision réellement futuriste de l’expérience vécue à bord d’un véhicule », explique Tim Yerdon, directeur international de l’innovation et du design chez Visteon.
« Pour donner toutes ses chances à ce processus d’innovation, nous voulions impliquer nos collaborateurs de toutes régions et tous départements confondus. Le problème est que nous n’avions généralement pas le même système informatique. Grâce à l’innovation sociale en ligne, nous avons pu créer une source unique d’information, veiller à ce que chaque communication soit visible par tous et rassembler l’ensemble des avis pour prendre les bonnes décisions rapidement et efficacement. »
Visteon a commencé avec un petit groupe d’utilisateurs qui a très vite pris de l’ampleur. « Comme nous souhaitions supprimer les frontières entre l’innovation en amont, l’étude conceptuelle et la réalisation, nous avons fait en sorte que le personnel de R&D, les ingénieurs, les designers, et les équipes de communication et de marketing réfléchissent ensemble », souligne T. Yerdon. « Cela nous a notamment permis de résoudre en quelques minutes les problèmes pour lesquels il fallait discuter pendant une heure. Quelle satisfaction de constater les retombées positives d’un travail pleinement collaboratif ! L’innovation sociale a permis le développement de la culture dont nous avions besoin pour réussir. »
COLLABORATION EN LIGNE
Collaborer est également une nécessité pour travailler au quotidien. Chez Eaton, qui conçoit et fabrique des pièces hydrauliques et électriques pour les constructeurs du secteur des transports, de l’équipement industriel et de l’aéronautique, la collaboration en ligne permet aux designers et aux ingénieurs en Europe, en Amérique du Nord et du Sud et en Inde de se répartir la charge de travail 24h/24.
« Nous comptons 20 000 collaborateurs en ligne, dont 4 800 ingénieurs à l’échelle mondiale en suivant la course du soleil, transmettant leur travail au centre suivant une fois leur journée achevée », explique Henri Seynaeve, vice-président de l’Engineering Center of Excellence pour le secteur industriel d’Eaton. « Cela revêt une grande importance dans notre stratégie commerciale de type « design everywhere » (« concevoir partout »), qui vise à accélérer la mise sur le marché de nos nouveaux produits. Depuis que nous pouvons faire fonctionner notre Centre de conception virtuelle dans le monde entier grâce à la collaboration en ligne, nous avons augmenté notre rapidité de conception de plus de 200%, sans embauche supplémentaire. »
H. Seynaeve ajoute que la plateforme d’Eaton permet d’attribuer des tâches en fonction de la disponibilité des ressources, indépendamment de la situation géographique. En outre, comme toutes les conceptions sont accessibles en ligne au moyen d’un simple navigateur Internet, cette solution supprime les obstacles liés à la diversité des outils d’ingénierie résultant de la stratégie d’acquisition agressive appliquée par Eaton.
3D LANGAGE UNIVERSEL
Chez Eaton, les ingénieurs peuvent faire passer le travail d’un collaborateur à l’autre sans perdre de temps. En effet, comme le souligne H. Seynaeve, la 3D est un langage universel qui communique des informations en contexte de façon à ce qu’elles soient accessibles en un coup d’œil, avantage exploité dans de nombreux secteurs industriels.
Dans le secteur minier, les modèles en 3D développés à partir de données provenant d’échantillons de forage aident les géologues à visualiser ce que le sol dissimule avant de creuser. Grâce à cet aperçu, ils peuvent prévoir la façon dont le site sera exploité et communiquer clairement leur plan à tous les acteurs concernés, des investisseurs aux ouvriers sur le terrain.
« C’est avant tout pour communiquer que nous comptons sur la 3D », explique Mark Muller, géologue en chef chez Mincor Resources, basé en Australie. « Un modèle en 3D nous donne les moyens de communiquer efficacement un plan aux personnes qui n’ont pas de formation en géologie. On peut le retourner, faire un zoom avant ou arrière, faire des coupes en tout point du modèle pour en montrer les détails ou encore modifier l’échelle instantanément. Au lieu d’essayer de conceptualiser à partir de centaines de plans papier en 2D, vous pouvez en avoir directement une vision holistique et comprendre instantanément ce que les données vous apprennent sur les caractéristiques du gisement. »
Les modèles en 3D se mettent à jour instantanément dès que de nouvelles données sont disponibles. « Pour mettre une intuition au banc d’essai ou découvrir les conséquences d’un changement d’approche, rien n’égale la puissance de la 3D. »
« Un modèle en 3D nous donne les moyens de communiquer efficacement un plan aux personnes qui n’ont pas de formation en géologie. »
Mark Muller
Géologue en chef, Mincor Resources
À l’autre extrémité du spectre énergétique, la société suisse Alstom Power fournit des équipements qui génèrent environ 25% de l’électricité mondiale, avec des applications pour toutes les sources d’énergie allant du gaz naturel à l’énergie solaire. L’une des missions de Joerg Ackermann, directeur de la formation chez Alstom Power, est d’aider ses clients à maintenir ces installations en bon état de fonctionnement 24h/24, 7j/7. Les programmes et autres supports pédagogiques lui permettent de former le personnel assurant le service sur le terrain et le service clients d’Alstom.
Après avoir utilisé pendant de nombreuses années des manuels de formation et de maintenance en 2D, désormais, l’équipe de J. Ackermann a introduit des animations en 3D pour illustrer la façon de monter, démonter et entretenir l’équipement d’Alstom. « Nous avons immédiatement été submergés de demandes d’animations supplémentaires par nos instructeurs », déclare-t-il. « Idem pour nos clients. Lorsqu’ils ont vu que les animations en 3D étaient disponibles, il a suffi de quelques jours seulement pour qu’ils abandonnent les documents 2D et adoptent la 3D. »
La 3D a également supprimé la plupart des instructions écrites, ainsi que la nécessité de recourir à la traduction. « Pour écrire que vous devez retourner ceci puis insérer cela à tel endroit, et ensuite le faire basculer de 90 degrés, il faut beaucoup de mots et c’est difficile à visualiser », poursuit J. Ackermann. « Avec la 3D, plus besoin de mots, donc plus rien à traduire. »
En visualisant en 3D la décomposition et la recomposition d’un assemblage, les clients peuvent eux-mêmes démonter, entretenir et remonter leur équipement plus rapidement. « Pendant toute la durée de la maintenance d’un assemblage, l’unité n’est pas productive et le client perd de l’argent », remarque J. Ackermann. « En montrant le processus au client plutôt qu’en le lui expliquant, nous lui permettons de gagner du temps, et cela se traduit par des bénéfices. En outre, cette démarche améliore la sécurité puisque l’on peut voir les risques d’une procédure avant de la mettre en œuvre et prendre ainsi toutes les précautions nécessaires », explique-t-il.
Comme le montrent ces exemples, les dernières solutions numériques modifient le mode de gestion de l’activité au 21e siècle, en permettant aux entreprises de collecter, interpréter, partager et collaborer afin de fournir à leurs clients de meilleures expériences.