Avis d’expert : Kevin Prouty


29 March 2021

4 minutes

Pour les fabricants cherchant à devenir réellement résilients, il est essentiel de pouvoir compter sur une gestion des données de haut niveau, soutenue par des jumeaux virtuels pilotés par l'IA, Kevin Prouty, d'IDC, nous livre ses explications :

Au cours des derniers mois, les fabricants les plus performants se sont démarqués de ceux en difficulté par leur capacité de résilience.

Durant cette période, l'une des plus imprévisibles de notre génération, les fabricants résilients disposant de l'infrastructure et des composants nécessaires pour changer de cap rapidement et réagir aux ajustements et aux demandes du marché ont pu rapidement s'adapter et rebondir efficacement.

Alors que nous entrons dans le monde d'après la pandémie, les fabricants tentent de renforcer la résilience de tous les aspects de leurs activités, et nous constatons déjà des progrès. En mai 2020, alors que la pandémie s'aggravait, nos recherches ont révélé que seuls 5 % des entreprises estimaient être suffisamment résilientes pour faire face à un avenir inconnu. Cependant, en octobre ce chiffre atteignait 40 %.

Bien que ce changement, opéré en seulement six mois, soit incroyable, le fait est que, pour parvenir à une prise de décision résiliente, 60 % des fabricants doivent encore développer et mettre en œuvre une stratégie pour transformer leur entreprise.

La gestion inefficace des données est au cœur du problème. Aujourd'hui, la plupart des entreprises ont du mal à gérer la quantité de données actuellement disponibles, et n'utilisent correctement qu'une fraction d'entre elles. Même les entreprises les plus matures sur le plan opérationnel peuvent être très rapidement submergées, par les données générées, mais aussi par la demande des employés qui en ont besoin.

Et le problème ne peut que s'accélérer à l'avenir. Avec des ressources opérationnelles plus connectées, la vidéo en tant que capteur et les informations sur les fournisseurs et les produits connectés, la quantité de données générées dans les entreprises industrielles devrait augmenter de 400 % au cours des cinq prochaines années. Comment traiter correctement ces données ? Une stratégie possible consisterait à réinventer le rôle des responsables intermédiaires. Il peut s'écouler des jours, des semaines, voire des mois pour que les informations dont les décideurs seniors ont besoin trouvent leur chemin à travers les différents niveaux de hiérarchie, chaque couche regroupant, analysant et interprétant les données avant de les transmettre au niveau supérieur. Ce faisant, les informations doivent également passer via différents niveaux organisationnels, et sont soumises à divers biais d'objectifs personnels, d'indicateurs clés de performance et de mesures incitatives.

« La quantité de données générées dans les entreprises industrielles devrait augmenter de 400 % au cours des cinq prochaines années. »

L'intelligence artificielle (IA) reste le domaine le plus largement sous-exploité pour résoudre le problème des données opérationnelles et l'incapacité des responsables intermédiaire à fonctionner efficacement dans un environnement à la fois riche en données et pauvre en informations exploitables. L'automatisation basée sur l'IA peut permettre de passer d'une approche humaine de la prise de décision à une approche assistée par les machines, voire entièrement prise en charge par les machines. L'IA constitue la base d'un processus de prise de décision plus résilient, rapide et efficace. Bien que cette transition nécessite des changements considérables, elle n'est pas insurmontable et ne doit pas nécessairement être réalisée d'un seul coup.

La première étape pour les fabricants consiste à digitaliser autant de ressources et de processus possible, afin que les données nécessaires soient disponibles pour créer un cadre de prise de décision efficace. Cela permettra d'informer un modèle intelligent représentant le monde physique en se basant sur les données, également appelé jumeau virtuel. Les plates-formes d'innovation métier sont capables d'utiliser des données contextualisées pour créer des jumeaux virtuels de n'importe quel produit physique, ressource, conception, processus ou opération, fournissant ainsi un contexte visuel qui donne instantanément une signification aux données.

Les jumeaux virtuels relient le monde physique, qui nécessite une interaction humaine et des connaissances institutionnelles, au monde numérique, où l'IA peut aider ou diriger la prise de décision, afin de compléter et guider le cadre dont ont besoin les responsables intermédiaires pour prendre des décisions résilientes. Le niveau de dépendance entre la prise de décision et l'IA dépendra de la taille du volume de données, de la complexité des relations multivariées entre les données et de la vitesse à laquelle les données seront ingérées.

Tout comme la nature elle-même, les fabricants résilients survivent dans des conditions difficiles. (Image de Louisiana Photography/AdobeStock)

L'important est d'abord d'admettre qu'aucun processus dépendant de l'homme ne peut, aujourd'hui, ingérer des quantités massives de données et générer des résultats dans le délai nécessaire à une prise de décision efficace. Les plates-formes d'innovation métier apportent donc la solution, et présentent instantanément des options de décision à la direction, via un tableau de bord en temps réel, ce qui facilite l'automatisation des processus de surveillance et de dépannage.

Bien que le chemin vers la réussite soit long, les différentes organisations opérationnelles génèrent de la valeur dès les premières étapes du développement des données et de la création de ces organisations d'ingénierie numérique. Celles qui ont recentré leurs efforts sur la prise de décisions résilientes ont pu améliorer leur productivité de 40 %, avec un investissement minimal. Elles sont également bien mieux préparées pour un avenir où la loi du plus fort ne fait pas référence à la taille ou à la force, mais à la résilience et à la capacité à évoluer rapidement, à saisir les opportunités et à être prêt pour la prochaine crise.

PROFIL : Kevin Prouty est vice-président du groupe IDC Energy and Manufacturing Insights. Il est responsable d'un groupe d'analystes qui fournissent des services de conseils basés sur la recherche, permettant aux dirigeants d'optimiser la valeur commerciale de leurs investissements technologiques et de minimiser les risques grâce à une planification précise.

Avant de rejoindre IDC, M. Prouty a travaillé dans de nombreuses entreprises prestigieuses, notamment Aberdeen Group, Motorola, AMR Research et Gartner, où il a créé des spécialités de recherche dans divers domaines, notamment les services publics, la fabrication, les applications d'entreprise et l'innovation produit.


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