Pour les entreprises, cette crise a considérablement bouleversé le paysage mondial. D'un côté, les compagnies aériennes, le tourisme mondial et le secteur de la culture – dont les concerts, événements sportifs et autres rassemblements de masse – essuient de lourdes pertes. De l'autre, le cabinet d'analyse mondial McKinsey & Company rapporte que le recours à la télémédecine a été multiplié par dix en 15 jours, tandis que le e-commerce affiche des résultats exceptionnels, équivalents à une décennie de croissance, en l'espace de trois mois seulement (voire deux mois pour les livraisons en ligne). L'enseignement à distance et le télétravail ont également connu un franc succès.
Qu'est-ce qui différencie les entreprises prospères des entreprises à la traîne ? D'une part, leur capacité à prendre le pli rapidement et à adopter cette « nouvelle réalité » grâce aux technologies digitales avancées. D'autre part, leur capacité à modéliser, tester et affiner de nouveaux scénarios, de nouveaux modèles d'entreprise et de nouvelles offres sous forme d'expériences virtuelles, afin d'obtenir une meilleure visibilité et une meilleure compréhension des données en les transformant en modèles 3D scientifiquement précis. Même s'il est fort probable qu'en cas de nouveau bouleversement, les choses se passent complètement différemment, les entreprises auront appris d'ici là à être plus agiles que jamais grâce à la digitalisation et à la virtualisation.
« La crise a montré que le monde était bien plus susceptible de connaître des perturbations – pandémie, cyberattaque ou encore crise climatique – que ne l'indique l'histoire », observe le Forum économique mondial. « Cette « nouvelle réalité » que nous expérimentons ne se résume pas qu'à la pandémie de COVID-19, mais aux événements de ce type de manière générale. »
Alors que des entreprises de tous horizons relèvent le défi en boostant leurs capacités digitales et virtuelles, le fossé entre les entreprises déjà prêtes et celles à la traîne ne cesse de se creuser.
« Le monde est bien plus susceptible de connaître des perturbations – pandémie, cyberattaque ou encore crise climatique – que ne l'indique l'histoire. Cette « nouvelle réalité » que nous expérimentons ne se résume pas qu'à la pandémie de COVID-19, mais aux événements de ce type de manière générale. »
Le Forum économique mondial
« Même avant que la pandémie de COVID-19 ne frappe, de nombreuses entreprises avaient du mal à suivre le rythme des avancées technologiques », observe le Boston Consulting Group dans son rapport 2020, « The Digital Path to Business Resilience » (« Digitalisation : vers la résilience des entreprises »). « Depuis le début de la pandémie, relever ce défi est devenu de plus en plus pressant, contribuant à une réelle prise de conscience : le monde du travail et la vie de manière générale seront plus digitalisés à l'avenir que ce que nous aurions pu imaginer. En dépendant de plus en plus des données, des analyses, des outils technologiques et de l'automatisation, la plupart des entreprises devront donc miser sur la digitalisation pour devenir résilientes. »
Définir une stratégie pour façonner le monde de demain
Afin d'assurer la continuité de leurs activités et de développer leur résilience face à d'éventuelles crises à venir, les entreprises ont besoin de technologies d'expérience virtuelle, capables de leur fournir une vue globale et un modèle opérationnel optimal.
« Notre environnement de travail va changer, alliant télétravail et travail au bureau, travail en équipes avec des horaires décalés et équipes travaillant sous forme de 'cellules' qui peuvent être isolées si un collaborateur tombe malade », déclare Thomas A. Stewart, directeur exécutif du National Center for the Middle Market du Fisher College of Business de l'université d'État de l'Ohio. « Cela pose des problèmes de gestion de la main-d'œuvre, impossibles à résoudre avec un simple bloc-notes et un tableur. Comment gérer des équipes à distance, par exemple ? Comment identifier les aménagements nécessaires pour les personnes en situation de handicap ou pour celles ne disposant pas d'une bonne installation informatique chez elles ? Et comment une entreprise s'assure-t-elle que ses collaborateurs et ses clients se sentent en sécurité ? »
Villes, établissements de santé, fabricants… Tous ont réalisé qu'il était impossible de réagir assez rapidement à partir de données collectées et analysées sur papier face à des situations en constante évolution – si tant est qu'il soit possible même d'accéder aux dossiers. Afin de renforcer la résilience des entreprises face à d'éventuelles crises à venir – aussi imprévisibles qu'une pandémie –, le cabinet de conseil et de recherche Gartner leur recommande d'agir dès aujourd'hui en définissant de nouveaux objectifs, afin de revoir leurs modèles stratégiques et opérationnels.
« Que ce soit en termes de main-d'œuvre, de méthodes de travail, de relation employeur-collaborateur ou encore d'écosystème d'entreprise, nous devons repartir de zéro et tout repenser », explique Chris Howard, directeur de recherche chez Gartner. « Même si la pandémie a réduit à néant la stratégie de certaines entreprises, elle leur a également permis d'acquérir une expérience non négligeable. L'heure est donc venue pour les équipes de direction des entreprises de se réunir autour de la table et de tirer les leçons afin de transformer leur modèle d'entreprise et leur modèle opérationnel pour façonner le monde de demain. »
« En fin de compte, les entreprises qui se porteront bien seront celles qui se demanderont comment investir [dans la digitalisation] leur permettra de répondre à leurs besoins opérationnels à court terme ; et comment ces investissements pourront leur offrir de nouvelles opportunités stratégiques à court, moyen et long terme. »
Thomas A. Stewart
Directeur exécutif, Fisher College of Business, université d'État de l'Ohio
D'après McKinsey & Company, les chaînes d'approvisionnement, très perturbées pendant la pandémie, vont probablement connaître une forte augmentation des dépenses consacrées à la résilience digitale. Depuis 2000, la valeur des biens intermédiaires échangés dans le monde a triplé, atteignant plus de 10 000 milliards de dollars américains. La pandémie a également mis en exergue la fragilité des chaînes d'approvisionnement, particulièrement longues et complexes. »
Dans un rapport d'août 2020 intitulé « Reimagining industrial supply chains » (« Réinventer les chaînes d'approvisionnement industrielles »), McKinsey & Company souligne que si les principaux indicateurs de performance des chaînes d'approvisionnement mondiales se sont améliorés au cours des dernières années avant la pandémie, le prix à payer de ce type de bouleversement peut être considérable.
« Ce n'est pas parce qu'une chaîne d'approvisionnement est efficace et rentable qu'elle sera résiliente. Et de nombreux exemples le prouvent, qu'il s'agisse du tremblement de terre au Japon en 2011 ou de la pandémie de COVID-19 cette année », indique le rapport. « Au cours des dernières années, au moins 1 entreprise sur 20 a subi une perturbation de sa chaîne d'approvisionnement, lui coûtant au moins 100 millions de dollars américains. »
D'après une étude menée par McKinsey & Company auprès des responsables de chaînes d'approvisionnement, différents moyens permettent de pallier ces faiblesses révélées par la pandémie : double approvisionnement en matières premières, augmentation des stocks de produits essentiels, nearshoring (délocalisation proche) ou régionalisation des chaînes d'approvisionnement, investissements dans « le big data et l'analytique avancée à chaque étape du processus de planification »... L'objectif ? Parvenir à anticiper d'éventuelles perturbations parmi les milliers de fournisseurs de deuxième et troisième niveau qui alimentent les quelques fournisseurs de premier niveau dont les fabricants OEM peuvent déjà suivre le statut.
Saisir de nouvelles opportunités de croissance
À la recherche de nouveaux modes de vie et de nouvelles méthodes de travail, les entreprises saisissent déjà de nouvelles opportunités.
« Il existe de véritables opportunités stratégiques qui nous permettent de tout repenser, des produits fournis aux méthodes de vente, en passant par le modèle opérationnel et le bilan », déclare Thomas A. Stewart. « Quoiqu'il en soit, il est nécessaire que les entreprises revoient leurs activités de différentes manières. C'est le moment idéal pour elles de mettre en œuvre les initiatives lancées par leur équipe informatique et de transformer leur production et leur marketing. »
Dans ce contexte, les entreprises commencent à renouer le dialogue, jusqu'ici cloisonné.
« Si un responsable informatique ne comprendra pas nécessairement le langage de la gouvernance et des bilans, le directeur stratégique ne saisira pas non plus les nuances de l'informatique », ajoute Thomas A. Stewart. « Imaginez une boîte à opportunités. Que ce soit le responsable informatique ou le directeur stratégique, tous deux ont la clé pour ouvrir cette boîte. Le problème ? Aucun des deux ne se doute qu'il faut utiliser les deux clés en même temps pour ouvrir la boîte. La bonne nouvelle ? Ils ne devraient pas tarder à le comprendre. »
$100 million
In each of the past several years, at least one company in 20 has suffered a supply chain disruption costing at least [US]$100 million.
McKinsey & Company, "Reimagining Industry Supply Chains"
From Grandes villes, to professionels de la santé chercheurs, fabricants… Tous sont en pleine transformation et découvrent le pouvoir de saisir de nouvelles opportunités en apportant chacune leur clé afin d'ouvrir ensemble le champ des possibles.
Les solutions digitales, sécurisées et sur le cloud permettent, par exemple, d'optimiser la formation et le support, afin que les étudiants et collaborateurs puissent passer facilement du télétravail au travail au bureau ou en classe, et vice versa.
GSea Design, entreprise française spécialisée dans la conception et la réalisation de structures en composite pour les projets maritimes et industriels, illustre parfaitement la manière dont, même en temps de crise, la digitalisation et la virtualisation favorisent une croissance continue.
« Malgré la pandémie de COVID-19 et le confinement, nous n'avons pas été impactés », déclare Robin Lordon, l'un des designers de l'entreprise. « Nous avons garanti de bout en bout la continuité des projets sur lesquels nous travaillions et démarrons de nouveaux projets. Notre plate-forme technologique – sur le cloud – répond parfaitement à nos besoins en matière de collaboration, que ce soit en interne ou en externe avec nos clients. C'est l'essence-même de la plate-forme. Nous travaillons systématiquement ensemble sur les mêmes données. »
Comme GSea Design, des entreprises en pleine digital transition découvrent la puissance des plates-formes digitales, à la recherche d'indicateurs sur les médias sociaux pour suivre l'évolution rapide des conditions commerciales et des ressentis des consommateurs. Grâce à cela, elles peuvent ainsi identifier et suivre les tendances, mais aussi comprendre les comportements sous-jacents des communautés et des marchés.
« Plus une entreprise est proche de ses clients, plus elle peut créer une relation de confiance au sein d'un environnement virtuel où partager des données, intégrer des paiements et avoir la visibilité nécessaire sur l'inventaire de chacun », affirme Thomas A. Stewart. « Dans cet environnement, il est possible de résoudre un problème sans avoir à se soucier de la protection de la propriété intellectuelle. Créer des systèmes résilients où chacun y trouve son compte constitue donc une véritable opportunité. »
La pandémie a considérablement impacté les grandes villes du monde entier. Mais si des solutions comme le jumeau virtuel 3D avaient été mises en œuvre à l'échelle nationale, elles auraient par exemple permis aux autorités publiques de suivre la propagation du virus et de savoir rapidement que le transfert de fournitures médicales essentielles depuis des zones où la pandémie n'était pas encore arrivée pouvait aider de manière efficace des zones déjà débordées.
« La modélisation 3D permet également aux villes de prévoir le retour de la population au bureau », déclare Sankar Villupuram, à la tête des services et produits digitaux en Asie de l'Est pour Arup, une entreprise mondiale spécialisée dans la construction et l'ingénierie dont le siège est basé à Londres.
Sankar Villupuram ajoute : « Nous avons pu modéliser le nombre de personnes qui pourraient se trouver à tout moment dans un bureau et ce, en toute sécurité. Nous avons également simulé la meilleure manière de gérer les points d'entrée dans un immeuble de bureaux de grande hauteur. Cela comprend la surveillance des niveaux de rassemblement au sein d'un espace à l'aide de capteurs, la réduction des niveaux de service des ascenseurs et le temps nécessaire pour se rendre sur son lieu de travail (non négligeable). Il vous suffit ensuite d'extrapoler les informations de ce bâtiment à un commissariat ou à une ville, et vous verrez que la valeur se multiplie rapidement. »
Cet exemple illustre parfaitement la manière dont le jumeau virtuel 3D d'un système ou d'un processus aide les villes et les entreprises digitalisées à tester leurs idées dans un environnement virtuel avant de les mettre en œuvre dans le monde réel. Il réduit ainsi le risque d'erreurs et évite les coûts supplémentaires associés. À son tour, le jumeau virtuel peut être enrichi de données collectées dans le monde réel. Ces données seront ensuite analysées afin de créer un cercle « virtuel » vertueux favorisant l'apprentissage continu.
« Le monde du travail et la vie de manière générale seront plus digitalisés à l'avenir que ce que nous aurions pu imaginer. La digitalisation jouera donc un rôle de plus en plus important dans la résilience des entreprises. »
Boston Consulting Group, « The Digital Path to Business Resilience » (« Digitalisation : vers la résilience des entreprises »)
En associant cette solution à la possibilité de simuler la contamination et la propagation du virus dans différents environnements, le Central-South Architectural Design Institute (CSADI) a pu optimiser rapidement la conception de l'hôpital Leishenshan de Wuhan, en Chine, construit spécialement pour répondre aux besoins de la pandémie de COVID-19.
Le principal objectif du CSADI était de réduire le risque d'infection croisée au sein de l'hôpital, mais aussi l'impact sur les communautés en dehors de l'hôpital, que ce soit dans des lieux publics ou dans les environs de manière générale. Pour ce faire, le CSADI a utilisé un logiciel de simulation 3D avancé, capable de modéliser et d'analyser les fluides intérieurs et extérieurs, le débit d'air aux alentours de l'hôpital et la dispersion du virus dans les systèmes de ventilation, afin de minimiser le risque de contamination par l'air. Grâce à ces efforts de simulation et de planification en amont de la conception et de la construction, l'hôpital a été construit en l'espace de 14 jours seulement. Il s'agit du plus grand hôpital modulaire de Chine dédié aux maladies infectieuses et aux patients atteints du COVID-19.
Alors que la pandémie de COVID-19 frappait et que les médecins de Chine et du monde entier luttaient pour soigner les patients, le laboratoire pharmaceutique Sanofi a pu continuer à développer des traitements grâce à une communication et une collaboration efficaces.
« En mettant en place un plan de crise solide et en investissant dans la digitalisation – notamment dans un Software-as-a-Service (Saas) et des services sur le cloud – au cours des dernières années, Sanofi a permis à la plupart de ses collaborateurs répartis à travers le monde de travailler depuis leur domicile et ce, rapidement », affirme Matteo di Tommaso, vice-président de la division Medical and R&D ITS de Sanofi basé dans le Massachusetts.
Dans le cadre de ses recherches, Sanofi n'a cessé d'interagir avec ses patients, malgré la distance. Grâce aux capacités mises en œuvre et à la disponibilité « virtuelle » des experts en cas de besoin, le laboratoire a ainsi pu maintenir la quasi-totalité de ses essais cliniques. D'après Matteo di Tommaso, les équipes informatiques de Sanofi ont pu s'adapter, rester transparentes et relever défi après défi de manière proactive, grâce à une gouvernance solide et une bonne communication avec des partenaires technologiques clés. Dans un contexte de crise qui nécessite d'innover rapidement pour mettre au point de nouveaux traitements, capables de sauver des vies, Sanofi a lancé en un temps record ses nouveaux essais pour le COVID-19.
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Pour Thomas A. Stewart de l'université d'État de l'Ohio, la transformation digitale permet en fin de compte aux entreprises de repenser leurs principales offres pour façonner le monde de demain.
« Les entreprises ont la possibilité de miser sur la transformation digitale afin de créer des opportunités et de booster la croissance de services à valeur ajoutée », ajoute-t-il. « Les fabricants, par exemple, ne se contentent plus de vendre un produit. Grâce à des solutions comme le jumeau virtuel et l'Internet des objets, ils vendent un produit et une maintenance prévisionnelle, mais aussi de nombreux autres services qui présentent une réelle valeur ajoutée. Ce sont tous ces éléments qui permettent de transformer une entreprise. »
Face à tous les changements et restrictions que la pandémie a imposés aux entreprises, constater que les investissements dans la digitalisation se poursuivent est très parlant.
« Pour les entreprises du marché intermédiaire, le nombre de projets digitaux n'a pas réduit. Il y a deux raisons à cela : d'un côté, ces projets sont rentables ; de l'autre, ils permettent aux entreprises de réorganiser leurs clients, leurs collaborateurs et leurs fournisseurs afin de se mettre à l'œuvre », affirme Thomas A. Stewart.
En juin 2020, d'après l'analyse de McKinsey & Company sur les entreprises en pleine transformation digitale dans sept secteurs différents, la quasi-totalité des divisions agiles ont mieux réagi que les divisions n'ayant pas fait preuve de flexibilité face à la pandémie de COVID-19. En investissant dans la digitalisation, elles ont gagné en agilité et ont pu améliorer la satisfaction de leurs clients et l'engagement de leurs collaborateurs, mais aussi leur performance opérationnelle.
« Il est essentiel d'investir dans les technologies pour pouvoir évoluer dans cet environnement », conclut Thomas A. Stewart. « En fin de compte, les entreprises qui se porteront bien seront celles qui se demanderont comment investir [dans la digitalisation] pour répondre à leurs besoins opérationnels à court terme ; et comment ces investissements pourront leur offrir de nouvelles opportunités stratégiques à court, moyen et long terme. En gardant ces deux questions à l'esprit, ces entreprises connaîtront de formidables opportunités. »